Certaines personnes ne comprendront pas ce que vous avez
Et ce n'est pas grave. Après tout, comment, même avec toute l'empathie du monde, pouvoir imaginer une telle horreur, une telle souffrance? Certes, c'est vrai, un minimum de respect et de compassion empêcherait de traiter quelqu'un souffrant de dépression de "paresseux", de "faible", et j'en passe. On peut accepter de ne pas comprendre, que quelque chose nous dépasse et qu'on a pas les capacités de savoir ce que la personne en face de nous ressent. On peut quand même respecter cette personne, dire "Je ne comprends pas ce que tu as même si tu me l'as expliqué parce qu'une telle chose est impensable pour moi, mais je te crois et je te respecte, ta parole me suffit". Mais quel est le pourcentage de personnes capables de réagir d'une manière aussi sage?
Je pense qu'on a peur de ce qu'on ne maîtrise pas. Mon père n'entrave rien à mes troubles, il est très maladroit et ses maladresses me font mal. J'ai finalement choisi de l'accepter. A quoi bon pleurer de frustration parce qu'il n'est pas là pour moi comme je voudrais qu'il le soit? Peut-être qu'il ne veut pas accepter, lui, que sa fille souffre, parce qu'il adore tout contrôler et qu'il est confronté à ses propres limites, des limites terrifiantes.
Ne vous attardez pas sur les gens qui ne comprennent pas, et surtout sur ceux qui ne veulent pas comprendre. Bénissez ceux qui sont là pour vous quoiqu'il arrive et qui vous tendront la main, qu'ils aient déjà vécu ou non ce que vous endurez. Je suis infiniment reconnaissante d'avoir une mère extraordinaire qui est malheureusement passée par une dépression elle aussi, quand elle avait mon âge.
Je ne pense pas qu'il soit utile de se lancer dans des explications extrêmement fines, compliquées, et vaines, afin de faire réaliser à vos proches votre souffrance réelle. C'est très dur d'imaginer une telle douleur, c'est impossible, et vous n'avez pas besoin qu'ils la comprennent. Si vous êtes suivi par un médecin ou un psychologue, si vous pouvez parler à des personnes qui ont les mêmes troubles, c'est suffisant.
Et si on vous juge par totale incompréhension ou sincère méchanceté (mais la méchanceté n'est-elle pas que de l'incompréhension et de la peur devant ce qu'on ne maîtrise pas? relativisez), ça ne veut pas dire que ces gens ont raison. Ils n'ont pas raison.
Vous n'êtes pas paresseux. Vous n'êtes pas lâche. Vous n'êtes pas sans valeur.
Et surtout, vous devez aussi accepter que les autres ont le droit de penser ce qu'ils pensent. C'est dommage, mais c'est surtout dommage pour eux.